Des chiens pourraient détecter une crise de panique imminente
Par La Presse Canadienne
Des chiens d'assistance pourraient apprendre à prévenir leur compagnon humain de l'imminence d'une crise de panique en détectant dans son haleine certains composés organiques volatils, portent à croire des travaux réalisés à l'université Dalhousie, en Nouvelle-Écosse.
Des années de travaux seront encore nécessaires afin de peaufiner cette découverte, mais si tout cela s'avère, l'alerte lancée par le chien pourrait un jour permettre à l'humain de désamorcer la crise de panique ― du moins en partie ― avant qu'elle ne prenne trop d'ampleur.
Cela pourrait se révéler particulièrement pertinent pour les gens qui présentent un trouble de stress post-traumatique (TSPT).
Ce n'est pas d'hier que des organisations entraînent des chiens pour accompagner des gens atteints d'un TSPT, a rappelé le professeur Simon Gadbois, qui dirige à Dalhousie un laboratoire qui se spécialiste dans l'olfaction canine, mais le tout reste un peu mystérieux.
«Les gens qui ont ces chiens-là vont dire que les chiens ont tendance à signaler un problème avant même qu'ils ne soient conscients qu'une panique s'en vient, a-t-il dit. Mais en science, on ne sait pas vraiment comment les chiens font ces alertes-là, alors c'est vraiment intrigant.»
Le professeur Gadbois et son équipe ont recruté aux fins de leur étude vingt-six sujets qui participaient aussi à une étude sur les traumatismes; un peu plus de la moitié d'entre eux présentaient des symptômes correspondant à un TSPT.
Les sujets ont participé à des séances pendant lesquelles ils ont porté un masque soit en demeurant calmes, soit en se remémorant leur traumatisme. Les masques imprégnés de l'odeur de leur haleine ont ensuite été présentés à des chiens, ce qui éliminait la possibilité que les animaux réagissent plutôt à des indices visuels.
Seulement deux des vingt-cinq chiens aussi recrutés pour l'étude ― Ivy et Callie, deux femelles ― ont démontré une habileté à différencier entre les deux masques, atteignant un taux de précision de 90 %.
Lors d'un deuxième test, Ivy a atteint un taux de précision de 74 % et Callie de 81 % quand on leur a présenté des échantillons individuels de différents COV associés au stress.
La performance d'Ivy a été associée à l'anxiété décrite par les humains, tandis que celle de Callie a été associée à la honte ressentie par les sujets à deux pattes. Cela pourrait vouloir dire que les chiens ont une idée légèrement différente de ce qui correspond au «stress».
De manière encore plus précise, il se pourrait que Ivy se soit concentrée sur les hormones (comme l'adrénaline) produites par l'axe adreno-sympathique-médullaire, tandis que Callie s'est possiblement attardée aux hormones (comme le cortisol) produites par l'axe hypothalamo-pituitaire-adrénalien.
Des deux, c'est l'axe adreno-sympathique-médullaire, celui qui permet de réagir presque instantanément si on croise un ours lors d'une randonnée en forêt, qui est le plus approprié dans ce contexte, puisque c'est la détection des hormones qu'il produit qui pourrait permettre au chien d'alerter son humain de ce qui se prépare.
«Si le chien fait une alerte précoce, a dit le professeur Gadbois, c'est fort probable que ce soit ce système-là qui est activé, qu'il détecte finalement, et non pas l'autre sur lequel tout le monde semble se concentrer présentement.»
L'axe hypothalamo-pituitaire-adrénalien, en revanche, est plutôt est responsable d'un stress chronique. Lorsqu'il est activé, a ajouté le chercheur, il faut deux ou trois minutes avant que quoi que ce soit change dans l'organisme, donc «c'est possible que ce soit celui qui est ciblé par les chiens, mais ça m'étonnerait», a-t-il dit.
Le professeur Gadbois et son équipe ont récemment obtenu le financement nécessaire pour poursuivre leurs travaux pendant encore au moins deux ans. Ils collaboreront maintenant avec une chimiste de Dalhousie pour essayer d'identifier encore plus précisément les composés organiques volatils en cause.
«La chimiste pense même qu'il est possible que les chiens soient supérieurs à la technologie qui existe (pour identifier les COV), a-t-il dit. Quand on parle d'une partie par milliard qui pourrait être détectée par un chien, c'est hallucinant, mais c'est la beauté de la nature.»
Les conclusions de cette étude ont été publiées par le journal médical Frontiers in Allergy.
Jean-Benoit Legault, La Presse Canadienne
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