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Northvolt construirait son usine de batteries sur un terrain en zone inondable

durée 15h10
4 octobre 2024
La Presse Canadienne, 2024
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Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

MONTRÉAL — Des zones d’inondation à risque «faible», «modéré», «élevé» et «très élevé» se trouvent sur le terrain où s'implantera Northvolt, selon des cartes mises en ligne cette semaine par la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM). La construction de bâtiments industriels dans ces zones inquiète le directeur du Réseau inondations intersectoriel du Québec.

Les cartes mises en ligne par la CMM lundi dernier permettent à l’utilisateur de découvrir dans quelle catégorie de risque se trouverait un secteur ou un quartier, selon le projet de réglementation des zones inondables proposé par Québec et qui doit être adopté cet automne.

Il y a quatre catégories de risques d’inondation dans la nouvelle réglementation: faible, modéré, élevé et très élevé et chacun des risques correspond à une couleur sur la carte.

Or, le terrain de Northvolt, d'une superficie de 170 hectares, contient les quatre couleurs.

Lorsqu’on superpose la nouvelle cartographie préliminaire avec la carte qui contient les endroits où Northvolt veut construire ses bâtiments à Saint-Basile-le-Grand et McMasterville, «on se rend compte qu’une partie du bâtiment qui va servir au recyclage des batteries se retrouve dans la zone de risque élevé ou très élevé», a observé avec inquiétude Philippe Gachon, professeur d’hydroclimatologie à l’UQAM.

L’usine de recyclage de Northvolt, à laquelle le professeur fait référence, est la seule partie du projet qui sera soumise au Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE).

Autorisation ministérielle

La réglementation prévue par Québec interdirait la construction de nouveaux bâtiments résidentiels dans les zones inondables.

Toutefois, le projet de règlement diffère en ce qui concerne les bâtiments non résidentiels.

La construction de ce type de bâtiments ferait l’objet «d’interdiction», mais serait «possible» par «autorisation ministérielle», selon le projet de règlement.

Le professeur Gachon est d’avis que ce type de bâtiment devrait être interdit en zone inondable.

«C’est très préoccupant, surtout pour des bâtiments industriels qui peuvent, éventuellement s'ils sont inondés, poser des problèmes de sécurité pour les personnes, mais aussi en termes de risque potentiel de contamination sur l'environnement», a indiqué celui qui est également directeur du Réseau inondations intersectoriel du Québec (RIIQ), un regroupement de 200 chercheurs dont la mission est d’améliorer la capacité du Québec à se préparer aux inondations.

«La rivière Richelieu est la source d'eau potable pour environ 80 000 personnes en aval de l'usine» et «la prise d’eau potable est située à environ 500 mètres du terrain», a ajouté Philipe Gachon, qui craint des rejets de nickel, de cobalt ou de lithium dans l’eau en cas d’inondations majeures.

«Peut-être qu’il y a une partie du terrain qui peut être éventuellement aménageable, mais pas à l'heure actuelle, à proximité de la rivière, surtout pour un bâtiment qui va servir à recycler des batteries et qui peut être potentiellement à risque si jamais il se retrouve sous l'eau, à moins que des aménagements particuliers y soient faits, de nature à complètement enlever ce risque-là», a-t-il ajouté.

Un terrain inondé en 2011

Philipe Gachon demeure à moins d’un kilomètre des terrains de Northvolt et il a encore en mémoire les inondations de la rivière Richelieu en 2011, alors que des milliers de résidences avaient été évacuées et que les Forces armées canadiennes avaient dû venir en aide à la population.

À l’époque, le terrain qui appartient aujourd’hui à Northvolt avait été inondé.

Ce secteur avait «absorbé» et «épongé beaucoup d’eau» en raison de ces milieux humides, a indiqué Philippe Gachon.

«Mais on a détruit une zone humide qui était parmi la plus importante qui restait dans la vallée du Richelieu», ce qui a pour conséquence de «mettre la région encore plus à risque en cas d’inondation majeure», selon lui.

Les représentants de Northvolt n’étaient pas disponibles pour réaliser une entrevue sur le sujet vendredi, mais la gestionnaire des communications Emmanuelle Rouillard-Moreau a indiqué, dans un courriel, que l’entreprise a «tenu compte des zones inondables dans la conception du complexe, tout en allant au-delà de la réglementation actuellement en vigueur afin de pouvoir faire face aux changements climatiques, à des crues plus importantes ou des changements éventuels dans la réglementation».

Le ministère de l’Environnement, de son côté, a également indiqué par écrit que «toutes les activités de Northvolt nécessitant une autorisation sont analysées selon la réglementation applicable et l'analyse tient compte de la présence de zones inondables».

Des cartes préliminaires

Sur le terrain de Northvolt, les zones identifiées comme étant à risque d’inondation selon les cartes de la CMM bordent la rivière Richelieu.

À certains endroits, ces zones s’étendent à quelques dizaines de mètres, à partir du rivage, mais à d’autres endroits sur la propriété, elles vont jusqu’à 100, voire 200 mètres de distance de la rive, selon les cartes de la CMM.

Dans un échange de courriels, une porte-parole du ministère de l’Environnement a rappelé que «les cartes diffusées par la CMM ne sont pas officielles et n'ont pas été adoptées».

Ce sont en effet des «cartes préliminaires», que la Communauté métropolitaine de Montréal a créées en utilisant la méthodologie du règlement proposé par Québec.

Au début de l’été, le gouvernement du Québec a lancé une consultation publique, qui doit se terminer le 17 octobre, sur la nouvelle réglementation concernant les zones inondables, ce qui inclut la nouvelle cartographie.

Selon la cartographie «traditionnelle» des zones inondables, le terrain qui appartient à Northvolt présente des cotes de récurrence de «0-20 ans» et de «20-100 ans».

La nouvelle cartographie, plus précise et qui contient quatre niveaux de risques, est nécessaire pour l’ensemble de la province, selon le gouvernement, notamment en raison des changements climatiques, de l’augmentation de la fréquence des inondations majeures et des coûts socioéconomiques qui y sont associés.

Stéphane Blais, La Presse Canadienne

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