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Le risque de leucémie des grands donneurs de sang n'est pas plus élevé

durée 12h03
13 mars 2025
La Presse Canadienne, 2024
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Temps de lecture   :  

3 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

MONTRÉAL — Les cellules sanguines des grands donneurs de sang ne contiennent pas plus de mutations pré-leucémiques que celles des autres, ont constaté des chercheurs européens.

Cela pourrait éventuellement mener à une meilleure compréhension de la manière dont se développent les cancers du sang, et de la raison pour laquelle ils apparaissent, permettant un dépistage plus rapide et une prise en charge plus efficace des patients dont le risque est le plus élevé.

«Je pense que justement, dans le futur, l'idée ce sera de voir ce qui est associé à cette prédisposition (à la leucémie) et est-ce qu'on peut la limiter par des médicaments ou des substances», a résumé la responsable de l'étude, la professeure Dominique Bonnet, que La Presse Canadienne a rejointe virtuellement à l'Institut Francis Crick, à Londres.

Lors d'un don de sang, ont expliqué les auteurs de l'étude, les cellules souches de la moelle osseuse produisent de nouvelles cellules sanguines pour remplacer celles qui ont été perdues.

Et même sans don de sang, a dit la professeure Bonnet, on parle de centaines de millions de nouvelles cellules produites chaque jour. Avec un tel volume, les risques de mutation génétique sont importants.

Ses collègues et elle ont donc analysé le sang de quelque 200 personnes qui avaient donné du sang trois fois par année depuis 40 ans ― pour un total de plus de 120 dons ― et celui d'un groupe contrôle de gens qui avaient fait moins de cinq dons au fil de leur vie.

«En donnant du sang régulièrement, on demande à la moelle de se régénérer encore plus souvent que ce qui est nécessaire, donc on se demandait si ça impliquait un risque de développer plus de mutations, et quel type de mutations ça pourrait engendrer», a résumé la professeure Bonnet.

Son équipe et elle ont découvert, dans le sang des deux groupes, des mutations au gène DNMT3A. Toutefois, dans le groupe des grands donneurs, ces changements n'ont pas été trouvés dans des secteurs connus comme étant pré-leucémiques, «c'est-à-dire des mutations qui augmentent chez la population générale la propension de développer des leucémies après quelques années», a dit la professeure Bonnet.

Puis, lors d'expériences en laboratoire, les chercheurs ont constaté que les cellules des grands donneurs ne se développaient pas si on les plaçait dans un environnement qui reproduisait celui d'une infection, contrairement aux cellules aux mutations pré-leucémiques.

«On a des études, chez la souris et chez l'homme, qui indiquent que ces mutations pré-leucémiques augmentent avec des infections répétées, a dit la professeure Bonnet. Et on a vu que les mutations augmentent le plus si on leur donne un stimulus inflammatoire.»

Une dernière série d'expériences a été réalisée chez des souris à qui on a injecté le sang des deux groupes.

Les cellules porteuses des mutations trouvées chez les donneurs fréquents se sont développées normalement et ont favorisé la production de globules rouges en cas de stress, sans que les cellules ne deviennent cancéreuses. En revanche, les mutations préleucémiques ont entraîné une augmentation prononcée des globules blancs, que ce soit dans des conditions de contrôle ou de stress.

Les chercheurs pensent qu'un don de sang régulier sélectionne les mutations permettant aux cellules de bien réagir à la perte de sang, mais ne sélectionne pas les mutations pré-leucémiques associées au cancer du sang.

«Ça veut dire que, sur un même gène, dépendant où se trouve la mutation, on peut avoir des conséquences complètement différentes, et ça, c'est très intéressant», a dit la professeure Bonnet.

Les conclusions de cette étude ont été publiées par le journal médical Blood.

Jean-Benoit Legault, La Presse Canadienne