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La fille d'Alice Munro, victime d'abus, accuse sa mère d'avoir défendu son beau-père

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8 juillet 2024
La Presse Canadienne, 2024
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Temps de lecture   :  

3 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

La plus jeune fille de la célèbre écrivaine canadienne Alice Munro s'est ouverte sur les abus sexuels commis par son beau-père et sur la profonde blessure qu'elle a ressentie lorsque sa mère a choisi de soutenir son mari plutôt que son enfant.

Dans un essai à la première personne publié dimanche dans le «Toronto Star», Andrea Robin Skinner décrit comment la nouvelliste est restée mariée à son second mari, Gerald Fremlin, même après avoir appris l'existence de ces abus.

Dans son article, Mme Skinner explique qu'elle a choisi de raconter son histoire pour que les Canadiens aient une image plus nuancée de la lauréate du prix Nobel, qui était vénérée comme une icône littéraire bien avant sa mort en mai.

«Je voulais que cette histoire, mon histoire, fasse partie des histoires que les gens racontent sur ma mère, écrit-elle. Je ne voulais plus jamais voir une entrevue, une biographie ou un événement qui n'aborde pas la réalité de ce qui m'est arrivé et le fait que ma mère, confrontée à la vérité, a choisi de rester avec mon agresseur et de le protéger.»

AVERTISSEMENT GRAPHIQUE : Les détails suivants peuvent perturber certains lecteurs.

Mme Skinner écrit dans le «Toronto Star» que les abus ont commencé en 1976, alors qu'elle avait neuf ans et qu'elle rendait visite à sa mère en Ontario pour l'été, puisqu'elle passait la majeure partie de l'année en Colombie-Britannique avec son père. Elle a écrit que M. Fremlin s'est glissé dans le lit où elle dormait et a initié un contact sexuel alors que Mme Munro était absente de la maison.

Le dernier jour de sa visite, elle se rappelle que M. Fremlin a commencé à lui demander des détails sur sa vie sexuelle et à partager des aspects de la sienne tout en la conduisant à l'aéroport.

Mme Skinner raconte qu'elle a d'abord raconté à son père et à son demi-frère ce qui s'était passé, mais que ni elle ni son père n'ont immédiatement informé M. Munro de ce qui s'était passé.

Elle affirme que M. Fremlin a continué à s'exhiber devant elle et à lui faire des propositions sexuelles jusqu'à ce qu'il se désintéresse d'elle une fois devenue adolescente.

À la suite de ces événements, elle dit avoir souffert de boulimie, d'insomnie et de migraines, et a abandonné un programme en développement international à l'Université de Toronto.

Dans sa vingtaine, Mme Skinner rapporte avoir écrit à Mme Munro une lettre détaillant les abus commis par M. Fremlin, mais elle affirme n'avoir reçu aucune compassion de la part de sa mère.

«Elle croyait que mon père nous avait fait garder le secret pour l'humilier, se souvient Mme Skinner. Elle m'a ensuite parlé d'autres enfants avec lesquels M. Fremlin était 'ami', en insistant sur le fait qu'elle se sentait personnellement trahie.

Se rendait-elle compte qu'elle parlait à une victime et que j'étais son enfant? Si c'était le cas, je ne l'ai pas ressenti».

Mme Munro est restée avec M. Fremlin jusqu'à sa mort en 2013. Elle aurait affirmé qu'elle avait été «informée trop tard» de ces abus, qu'elle aimait trop son mari pour le quitter et qu'on ne pouvait pas attendre d'elle qu'elle «refuse de répondre à ses propres besoins», écrit Mme Skinner.

Elle a signalé les abus à la police en 2005, et M. Fremlin a finalement plaidé coupable à une accusation d'attentat à la pudeur.

Elle considère que les abus qu'elle a subis sont restés un secret de polichinelle dans la famille Munro pendant des années et que, pendant un certain temps, elle s'est éloignée de toute sa famille pour cette raison.

Mme Skinner, qui est aujourd'hui professeur de méditation et de pleine conscience, a déclaré s'être réconciliée avec ses frères et sœurs, mais jamais avec sa mère.

La Presse Canadienne